Chercheur : Dr Françoise Mougeon, Département d’Études françaises, Glendon, Université York.

Questions de recherche : (1) Existe-t-il un seuil au-delà duquel l’acquisition de l’usage sociolinguistiquement approprié de la langue seconde ne peut plus avoir lieu ‘ Ou, au contraire, l’acquisition consciente de la variation en langue seconde peut-elle se faire à n’importe quel âge y compris chez de jeunes adultes ‘ Si oui, est-ce que l’apprenant arrive à maîtriser les règles sociolinguistiques et sociostylistiques qui prévalent dans l’usage natif du français ‘

(2) Quels sont les facteurs sociaux et socio-éducatifs les plus propices à promouvoir un usage plus approprié de la langue seconde ‘ De l’apprentissage formel en salle de classe ou de l’adoption de mesures personnelles modifiant son style de vie pour y intégrer l’usage actif de la langue seconde en situation naturelle, quel choix est le plus décisif dans l’acquisition d’une compétence sociolinguistique acceptable pour un locuteur natif’ Quel est alors le rôle des institutions post-secondaires en termes de formation linguistique des étudiants ‘

Méthode : Cette recherche utilise une approche à la fois quantitative et qualitative et s’inspire de la sociolinguistique variationniste . La quantification de la variation est mesurée à l’aide d’un programme de régression multiple (GOLDVARB) appliqué à des corpus recueillis lors d’entrevues semi-dirigées d’environ une heure entre des étudiants de français langue seconde de 1re et de 4e année et une personne francophone. Les données issues de ces entrevues sont analysées à la lumière de l’information sociologique obtenue par questionnaire écrit et les résultats quantifiés analysés et confrontés à ceux d’études utilisant une méthodologie de recherche semblable et à ceux d’études portant sur des locuteurs de français langue seconde et de français langue première.

Résultats et conclusions : Les résultats obtenus jusqu’à ce stade de la recherche font apparaître l’impact important de l’usage « naturel » de la langue dans des situations de la vie réelle et en dehors du milieu d’apprentissage institutionnel sur la maîtrise des règles d’usage sociolinguistiques. Le maniement approprié de la langue seconde est grandement amélioré et est à la mesure de l’engagement personnel de l’individu à utiliser sa langue seconde le plus souvent possible et dans des contextes variés.

D’autre part, cette étude confirme l’importance de l’exposition précoce, intense et prolongée à la langue seconde, déjà identifiée comme facteur majeur dans l’acquisition de la compétence linguistique et sociolinguistique des élèves d’immersion en Ontario et au Québec.

De plus, cette étude confirme l’importance et l’efficacité d’un séjour prolongé en milieu francophone pour ce qui est de l’appropriation des règles sociostylistiques utilisées par les locuteurs natifs du français. Finalement, il semble que les multilingues, s’ils font preuve de plus de facilité à apprendre le français comme troisième ou quatrième langue, s’impliquent moins que les bilingues dans leur acquisition plus poussée de cette langue et ont tendance à se contenter de viser une compétence fonctionnelle du français.

Communication des résultats : Les divers résultats de cette étude ont fait l’objet de conférences lors de colloques ou congrès au Canada et hors du pays. De plus. Des articles sur l’étude de variables spécifiques ont été publiés (JFLS, CMLR, entre autres). Cette étude étant encore en cours, d’autres articles sont à paraître.

Retombées sur la discipline : Cette étude intéresse les linguistes appliqués : elle met en vedette la place d’un usage stylistique et sociolinguistique approprié dans la communication avec des locuteurs natifs en milieu social comme professionnel, et donc insiste sur l’importance à accorder à cet aspect dans l’acquisition de la langue seconde. En ce sens, cette étude peut modifier de façon significative la façon dont on appréhendera les traits de langue qui doivent faire l’objet d’un enseignement formel. L’étude met aussi en évidence le fait que les étudiants ayant une bonne connaissance de leurs stratégies d’apprentissage et une bonne compréhension de leur bilinguisme individuel font des choix plus éclairés qui font d’eux des bilingues plus efficaces. La formation à l’apprentissage des langues constitue donc une part importante du succès de l’acquisition de cette langue par l’apprenant.

Retombées sociales et usagers potentiels : Cette étude renseigne les institutions post-secondaires offrant des cours de langue seconde à leurs étudiants. Elle peut contribuer à la révision de contenus de cours et de programmes et de leurs modes d’enseignement. Le rôle significatif de l’expérience linguistique en milieu social et professionnel naturel porte à s’interroger sur les pratiques utilisées présentement en salle de classe et sur les finalités des programmes offerts.

Partenaires externes : University of Toronto

Mots clefs : Compétence sociostylistique, acquisition, français, langue seconde